28/10/2012

Changement d'adresse

Salut,

Titanecdote a déménagé à l'adresse suivante :

http://titanecdote.wordpress.com

Alors n'hésitez pas à m'y retrouver et à enfin laisser des commentaires.

Bises et à très vite.

Spiderman, mon sauveur !


« Bonjour Monsieur Spiderman, je m’appelle Titane, je n’ai plus cinq ans et demi et j’aimerais savoir comment on fait pour tisser une belle toile d’araignée. Merci ».

Spiderman : Bonjour Titane. Alors sache que je suis très content que tu me poses cette question parce que tisser un grand réseau de fils est un travail qui demande de la méthode, de l’entrainement et de la persévérance.
Pour commencer, il faut sortir de chez toi. Etre un peu ambitieux sur la dimension de ta toile. En restant dans ta chambre, tu t’apercevras bien vite qu’elle ne prendra pas la dimension nécessaire. De plus, elle manquera d’air et de quelques intempéries qui ne feront que la renforcer. Alors, premier conseil : sors.

Ensuite, tu commenceras par un quartier que tu connais assez bien, dans lequel tu sais que tes fils seront assez solides. Moi j’aimais bien, au début, tisser des toiles près des maisons de mes amis. Je me sentais rassuré.

Et puis au fur et à mesure, tu prendras confiance et tu t’apercevras très vite que des éléments extérieurs t’aideront à consolider et à améliorer l’étendue et la qualité de ta toile. N’hésite pas à les utiliser, même si tu ne connais pas bien leur origine. Le hasard fait souvent bien les choses. Peut-être même que tu deviendras un peu plus culottée, si je puis me permettre l’expression ! Tu n’imagines pas ce que ça a été pour moi de créer un immense réseau de fils depuis le sommet de l’Empire State Building ! Il m’en a fallu du courage pour aller au-devant de cette aventure. J’ai pris des risques – cela faisait seulement quelques semaines que j’avais commencé à tisser ! – mais j’ai été récompensé.

Ensuite, il te faudra apprendre à consolider ta toile. Tu dois toujours garder à l’esprit que l’entretien reste le maître-mot de la longévité. N’abandonne pas ton ouvrage en cours de route. Tu serais déçue. Au contraire, renforce-le, prolonge-le. Et même si on te dit souvent le contraire, peut-être que tu te mettras à partager d’autres toiles, que l’on acceptera que tu passes par d’autres réseaux de fils qui ne sont pas les tiens. Tu auras ainsi l’occasion d’observer le travail des autres et de t’approprier de nouvelles techniques, de nouvelles matières.

C’est à ce moment-là que ton travail de tisseuse sera reconnu. Et tu pourras enfin cueillir les fruits de ton travail. Alors, hop, hop, hop, trêve de bavardages, on se met au boulot !

27/09/2012

Angle d'attaque n°2


Ca f’sait déjà une paye que je battais des ailes sur ce foutu toit. Heureusement qu’il n’était pas trop haut pour que je puisse y hisser ma vieille carcasse. Quand je pense à la vie que j’aurais pu mener si ces cons d’êtres humains n’avaient pas dégueulassé leurs sols avec leurs foutus pesticides.

Et me voilà aujourd’hui, à Amsterdam, à tenter de rouler ma bosse au milieu de ces jeunes piafs, toujours prêts à quémander des miettes de leur bouffe infâme. Y a pas idée d’ingurgiter des trucs aussi infects. Pizzas, hamburgers, frittes huileuses dégoulinantes. C’est pas dieu possible, on a l’impression de bouffer la Mer morte quand on les gobe. Si vous cherchez des fruits frais, oubliez, même les feuilles d’arbres sont contaminées. 

Le problème, c’est qu’au bout d’un moment, t’y coupe pas. T’as la dalle et faut bien que tu survives. Alors tu fais comme ces crétins à deux pattes. Tu plonges dans la junk-food. Tu m’étonnes qu’ils soient gras à 40 ans. Y a qu’à voir ce que je suis devenu. Je suis au bord de la crise cardiaque. J’ai les muscles avachis et le plumage décrépit.

J’ose même pas me présenter face à une donzelle. Elle va penser quoi à votre avis ? Que je suis juste une grosse volaille libidineuse, à peine capable de becqueter un mets plus délicat qu’une cuisse de poulet grillée. Vous vous rendez compte à quoi on est réduit ? On bouffe presque nos congénères. Quand j’y pense j’ai des envies de vengeance. J’vais pas refaire la scène des Oiseaux. A moi tout seul, je ressemblerais plus à un pachyderme au ralentis tentant d’effectuer un triple Lutz piqué.

Et vous savez ce que ça fait cette pitance atroce sur un organisme de volatile innocent ? Ça lui pète les entrailles. Ça lui colle une chtouille immonde qui révulserait les yeux des guerriers les plus aguerris. Je vous assure que le bide d’un pigeon à Amsterdam, c’est pire que le tremblement de terre provoquant une explosion à Fukushima.

Alors forcément, face à cette injustice et cette violence imposées aux animaux (parce que je ne vous parle pas de mes copains les rats ou de ces grosses coquines de mouettes), on développe des idées. On fomente des stratagèmes, on calcule, on ressasse. En écoutant les borborygmes de sa bidoche, on devient pervers, on s’encanaille.

Et soudain, elle est apparue. Elle avait pourtant l’air sympa avec son béret noir, son pull noir. Sobre, assez nature. J’aurais pu avoir pitié. J’aurais pu me mettre à sa place. Si ça tombe, c’était une défenseuse des animaux, une amoureuse de la bouffe fraîche.

Mais non, le ressentiment était trop fort. Il fallait frapper à l’aveugle, à la terroriste. A bas les innocents. Pas de pitié. Alors je me suis installé confortablement au bord du toit. J’ai attendu, patiemment, qu’elle ressorte de ce magasin d’fripes. La douleur était là, mais je savais que ça allait sortir. Le soulagement ne serait que meilleur.

Et quand j’ai aperçu le haut de son couvre-chef, j’ai largué les bombes. Je rendais justice à ma famille, à ma race. Jouissance absolue. Elle en avait de la tête jusqu’au bout du bras. Mission accomplie. La bidoche vide et l’esprit léger, j’ai pu retourner à mes occupations favorites. Roucouler… et bouffer.

Angle d'attaque n°1


Je suis sortie du magasin de fripes. Un pigeon obèse m’a chié dessus. Con de pigeon.

02/09/2012

Et après, on dira que...


Ce matin quand le réveil a sonné à huit heures, j'ai soudainement bondi comme une furie, prête à prendre ma douche en quatrième vitesse, hurlant à tous vents : « P... je suis à la bourre, mais mince quelle andouille, je vais être en retard. » Réponse de l'amoureux : « Mais pourquoi ? ». Moi : « Ben c'est ma pré-rentrée, je prends à neuf heures, roooh zuute... ». Lui encore, voix ensommeillée : « On est dimanche, c'est moi qui doit me lever, pas toi. » Soulagement, retour dans le lit chaud comme si c'était la dernière merveille du monde, le cocon et la douceur absolue, comme dans les pubs, sourire de satisfaction accroché aux oreilles !

         « Chérie, j'ai enfin trouvé pourquoi Einstein n'avait pas tout à fait raison dans sa théorie de la relativité. Ma découverte va changer la face des sciences. Dieu sait que j'en ai passé du temps sur cette recherche ! Mes efforts sont enfin récompensés ! Les étudiants vont m'aduler à présent. » « Oui mon chéri, dors. Tu as juste fait un autre rêve comme durant toute la semaine. N'oublie pas, ce n'est que demain la rentrée et le laboratoire du lycée n'est pas encore réparé. Allez dors. »

         Cri dans la nuit,  main à la gorge, yeux exorbités, sueurs froides. Une impression fugace d'avoir perdu toute son énergie. « Que se passe-t-il mon amour ? ». « Ils m'ont encore trouvé, vérifie s'il te plaît, je suis sûre qu'ils ont encore atteint leur but. Et leurs yeux, si tu avais vu leurs yeux. Et ce teint livide, morts mais vivants. », « Écoute, il faut quand même que tu parviennes à t'apaiser par rapport à ça. Je te le redis : tu n'as aucune marque dans le cou. Tes élèves ne sont pas des vampires. »

         « Et donc, là, l'élève m'a répondu : « Et la vieille, si tu me lâchais un peu. » [blabla]. Je te raconte pas comment le cours de mon collègue s'est déroulé. Un flop complet, toujours à cause de Chaprot. Mais on ne peut pas le virer du collège parce que sinon il n'a plus aucun établissement où aller...[blabla] Et le principal m'a affirmé que …[blabla] Parce que d'un autre côté, je crains qu'ils n'aient pas le niveau pour comprendre cette œuvre...[blabla]. Pourtant j'ai passé du temps sur la préparation, mais ils ne s'intéressaient à rien, j'avais l'impression de parler dans le vide, tu sais comme quand [blabla] ». « D'accord ma chérie, mais si tu me laissais le temps d'accrocher mon manteau, de m'asseoir, de t'embrasser, avant de me raconter ta journée au collège, hein ? Si tu décrochais quand tu rentres à la maison ? Non ? »

         « Tiens, ça me fait penser à mon élève Chaprot, tu sais celui dont je t'ai parlé. La fois où il a dessiné ce magnifique paysage, tu sais, je t'en avais parlé. Qu'est-ce qu'il était doué, je vais le regretter. ». « Oui, mais là, tu es sur une île de la Méditerranée, pendant les vacances, avec ta famille, tes amis. Alors oui, la mer est belle mais je ne vois pas en quoi elle peut te rappeler un de tes élèves qui avait dessiné ses vacances dans les Alpes. »

         Je ne comprends pas. J'ai mal à la gorge, je dors mal, je me sens faible. J'ai le crâne en vrac, j'ai mal au ventre. Je respire pas très bien. J'ai des angoisses, je fais des cauchemars. Qu'est-ce qui m'arrive ? Pourtant les vacances étaient bien, je devrais être en forme. « Non, tu ne peux pas être en forme parce que dans une semaine, c'est la rentrée ! ». Argument implacable.

         Et après, on dira que les profs ne sont pas sérieux, qu'ils ne prennent pas leur boulot à cœur et qu'ils font toujours ça en dilettante. 





07/08/2012

WOT... je te hais

Cette chronique s’adresse aux dizaines de milliers de jeunes femmes, moins jeunes femmes, mères de famille débordées qui ont chez elles un énergumène de type masculin qui a eu la bonne idée, un jour, de découvrir un jeu « massivement multi-joueurs » prénommé délicatement WORLD OF TANKS, WOT pour les intimes. Avec l’abréviation, ça fait presque nom de dieu viking, mais que nenni, ce sont juste des tanks qui se tirent dessus. Le tout ponctué de phrases récurrentes : « Pan dans les dents ; celui-là ne l’a pas percé ; il n’a pas pénétré le blindage ; c’est tombé juste à côté ». Vous avez tout de même la possibilité de changer la langue ce qui laisse parfois croire que votre partenaire est devenu multilingue : « Let’s get the show on the road !» Yes, trop classe. Ça donne presque envie de se trémousser sur un dancefloor. Sans parler des discussions au casque entre joueurs qui vous donnent presque l’impression de participer à un dialogue de sourd puisque vous ne savez jamais tout à fait à qui s’adresse l’élu de votre cœur. Pour vous amuser, vous tentez d’ailleurs subrepticement d’insérer des affirmations n’ayant aucun rapport avec leur conversation afin de brouiller la concentration du joueur sur canapé. 

Un jeu donc qui, il faut bien le dire, finira forcément par vous taper sur les nerfs, même si vous essayez régulièrement de vous persuader que ça a des bons côtés. Pendant ce temps, vous pouvez vous entraîner au strip-tease sans être dérangée par un homme en rut, il ne remarque pas vos déhanchements ; vous pouvez tout aussi bien faire le mur du lit conjugal puisque de toute façon, il est vide jusqu’à deux heures du mat ; c’est en général le moment où vous pouvez appeler vos copines pendant deux heures au téléphone et vous épancher sur votre malheur sans être interrompue ; mais vous avez aussi du temps pour créer, vous manucurer ou tout simplement écrire une chronique sur le jeu de malheur qui a fait éruption dans votre vie sans que vous l’ayez invité. Mais toutes ces alternatives ne comblent pas la colère sourde qui gronde dans votre esprit.

Non, parce que ce jeu est chronophage (oubliez les soirées en amoureux), addictif (à partir du moment où le jeu est pratiqué tous les soirs, tous les jours et jusque tard dans la nuit, on doit pouvoir parler d’addiction, non ?) et surtout il entraîne une apathie qui laisse songeur et perplexe. Pendant tout ce temps passé à jouer, vous auriez pu passer une soirée agréable, aller au cinéma, jouer à des jeux DE SOCIETE, faire plein de gros câlins, sortir vous balader, prendre l’air, inventer une vie originale à deux. 

Alors je m’adresse à présent au concepteur de ce jeu maudit. Toi, oui toi, petit concepteur de mes deux sache que si par cas je te croise dans la rue, par le plus grand des hasards que peut parfois procurer la vie, sache que je ne t’épargnerai pas. Où que tu sois, tes nuits seront désormais sans repos pour compenser mes heures d’attente dans le lit froid. N’oublie pas que le nombre de femmes bafouées augmente quotidiennement. Ta vie pourrait devenir un cauchemar plus grand encore que le récit atroce et sublime des Chants de Maldoror. Nous te traquerons dans les recoins les plus profonds de la planète. Notre hargne est sans limite. Nous t’exécrons, nous te conchions. Notre colère n’a de limite que l’amour que nous portons à notre homme. Mais ne l’oublie pas, petit concepteur, surtout ne l’oublie pas : NOUS SOMMES LEGION.

06/08/2012

Dis, pourquoi tu dors pas ?

Tiens, il y a une tache au plafond. C’est bizarre, elle n’y était pas avant, ou alors, j’ai pas remarqué. Qu’est-ce que ça peut bien être ? Une fuite chez les voisins du dessus ? Non ça n’a pas l’air marron, et puis ils nous auraient prévenu, non ? C’est étrange on dirait qu’elle est un peu rouge. Il est fait avec quels matériaux cet immeuble au fait. Bon on s’en fout, rendors-toi. Et si c’était du sang ? Mais oui allez, dors. Non mais vraiment, ça fait longtemps qu’on les entend plus les voisins. Surtout leur bébé. Oh mon dieu et s’ils l’avaient tué. Peut-être qu’ils se sont enfuis et qu’ils l’ont laissé se vider comme un cochon égorgé. Merde, c’est dégueu. Je vais pas réussir à me rendormir là. Je me disais bien que je les trouvais louches ces individus. Et s’ils sont encore là, qui sait si ce ne sont pas des gros psychopathes. Je vais faire attention en les croisant maintenant. Putain ça fout les jetons. Allez dors, dors. Force-toi un peu et pense à des choses plus gaies. Rahh, c’est mort, je vais lire mon livre à la place : L’étrangleur du troisième étage, ça me changera les idées !
        
         Vous connaissez ça vous aussi ? Oui certainement. C’est un petit peu agaçant une insomnie, n’est-ce pas ? Elles sont comme des hydres. Vous avez beau les chasser, elles reviennent sans cesse envahir vos nuits. Elles sont multiformes, puisent leurs origines dans toutes les sources de frustrations, de peurs, d’angoisses et de soucis qui vous submergent. Le florilège des pensées qui nous assaillent la nuit laisse entrevoir un soupçon de schizophrénie aiguë. Certaines sont soft d’autres à la limite de l’internement.

         Il y a les insomnies qui vous permettent de configurer votre journée du lendemain, les « insomnies listing ».
« Alors je vais me lever à 7 heures, c'est-à-dire dans moins de deux heures. Sachant que je n’ai dormi que trois heures cette nuit, cela me laisse la possibilité de : me lever, faire le ménage, la vaisselle, la lessive, ranger tous les papiers, aller au boulot, assurer les presque 10 heures de présence sans piquer du nez, rentrer, faire les courses, finir de tailler et d’assembler ma prochaine robe, préparer le repas, débarrasser, refaire la vaisselle, (ici, c’est une femme sans enfant évidemment, sinon, il faudrait ajouter lever les enfants, les habiller, les faire petit-déjeuner, retrouver les affaires de classe qui manquent dans le cartable, mais pourquoi ça n’a pas été fait la veille, bon sang, les amener à l’école, les récupérer, amener le grand au rugby, le petit au judo, vérifier les devoirs, leur faire prendre le bain, les faire manger, laver les dents, lire une histoire, lutter pour que le premier éteigne la lumière et que l’autre ne fasse pas de cauchemar et pipi au lit), être sublime pour votre amoureux, faire un câlin, et… vous replonger dans une foutue insomnie.
Après avoir imaginé cette journée qui vous attend, il est évidemment impossible pour vous d’achever les deux heures de sommeil qui vous restaient. La journée va forcément prendre une tournure moins précise, plus chaotique. Du genre : vous vous cognez le pied au réveil, le chauffe-eau a pété, la voiture ne démarre pas, vous explosez au boulot déversant un maelström incohérent d’inepties à tous ceux que vous croisez, vous oubliez de récupérer le petit au judo, vous finissez par le retrouver au commissariat puisqu’on n’a pas pu vous joindre sur votre portable éteint, vous passez pour une mère indigne, le dîner crame parce que vous êtes en train de faire trente-six choses à la fois. Vous pensez très brièvement à faire un énorme bang avec le méthane qui s’échappe des brûleurs de la cuisinière mais votre optimisme vous en défend... Bref, la journée que vous aviez planifié avec précision se transforme en hécatombe pour s’achever en une chute vertigineuse dans un sommeil profond de plusieurs heures pendant lesquelles le monde pourrait bien s’effondrer, vos enfants détruire entièrement la baraque. Mais non, au contraire, face à cet épuisement absolu, votre compagnon s’occupe de tout en disant à voix basse à vos rejetons : « Chut les enfants, maman est très fatiguée aujourd’hui, alors on ne va pas faire de bruit ni d’histoire et on va tout faire à sa place ce soir. » Tirez-en la leçon que vous voulez !

         On vit aussi parfois l’insomnie-efficacité : tout ce que vous avez planifié dans l’insomnie ci-dessus, vous le faites pendant la nuit. Dans ce cas, essayez, si possible, de ne pas inclure toutes les tâches concernant vos enfants, vous finiriez encore au poste en laissant votre plus petit devant la salle de judo à 3 heures du matin ! Ca ne se fait pas, tout simplement. Non vraiment.

         Il y a aussi l’insomnie où vous rejouez votre journée. Vous savez, celle où vous vous êtes retrouvée incapable de riposter aux attaques, où les mots sont venus quelques heures après la bataille, celle où on se réfugie dans les toilettes après une rixe et qu’on se regarde dans un miroir en se disant qu’on est trop conne bordel de bordel. Mais cette nuit, pendant cette absence de sommeil presque salutaire, vous envoyez enfin péter votre collègue qui vous charrie sans relâche, les réponses aux angoisses que vous aviez eues sont effacées d’un revers de conscience nonchalante. Vous rechargez vos accu en puissance de feu redoutable. Cette insomnie-là est revigorante, mais ne sentez-vous pas un léger goût amer de : « Mais pourquoi n’as-tu pas eu la force de dire tout ça sur le moment ? » La prochaine fois, apprenez par cœur vos répliques cinglantes ; entrainez-vous sur votre compagnon, vos enfants, faites comme vous voulez, mais ne laissez pas passer les leçons de cette décharge d’adrénaline.

         Bon, il y a aussi l’insomnie-partagée. Celle-ci est vraiment fourbe, égoïste. C’est celle du : « Tu dors ? Hé, tu dors ? Hého, tu dors ? Oh pardon je t’ai réveillé. Désolée, j’arrivais pas à dormir parce que blablablablablablablablablabla. » Alors-là, dites-le vous tout net, si votre moitié ne vous tranche pas la gorge c’est qu’elle fait preuve d’un amour inconditionnel dont il s’agirait de conserver tout l’éclat pendant encore un bon moment. Alors choisissez une autre insomnie plutôt que d’affronter la honte d’avoir pollué l’esprit d’un être aimé. Bouh, pas beau…

         Comme vous le voyez, vous n’êtes pas seule face à votre psychopathie du sommeil. Alors racontez-nous, vous aussi, vos insomnies. Rassurez-nous en prouvant que tous ces moments de grande solitude ne sont pas uniques. Aidez-nous à accepter nos petits moments de folie passagère. Elle deviendra plus douce et acceptable. Et puis, vous avez peut-être des petits trucs infaillibles pour les faire passer. Nous acceptons tout : psy, tartes dans la gueule ou sages recettes de grands-mères.

24/07/2012

Street Fighter ou Woodstock ?

Fight number one : Arrête de me couper la parole, je ne peux pas en placer une ; tu ne m’écoutes pas ; mais non c’est toi, tu m’agresses ; tu as tort ; allez tais-toi, tu dis n’importe quoi ; ok je ne dis plus rien.

Ha là, là, quel échange superbe de coups dans cette première partie. Le premier round est particulièrement serré ; les répliques fusent et les deux concurrents s’affrontent corps et âme dans une hargne inépuisable. Le silence de fin est lourd de sens et a dû méchamment affaiblir l’adversaire qui ne peut riposter face à une décision si rapide. Après ce moment d’une intensité rare, les deux lutteurs vont devoir se ressourcer afin de persifler plus efficacement encore. Mais voyons le deuxième round.

Fight number two : De toutes façons ça a toujours été comme ça ; mes arguments ne valent jamais rien ; et moi alors, tu prends en compte ce que je dis ? Mais j’ai pas besoin de toi pour m’en sortir ; c’est ça, j’aimerais voir ça ; oui, tu verras, l’avenir nous le dira et j’ai déjà fait mes preuves, pas toi.

Ha c’est superbe. Insinuation de mauvaise conscience, esprit revanchard, dénigrement, estime de soi alternant entre sur-estime et sous-estime. Ces concurrents sont extraordinaires d’endurance. Oui surtout quand on sait qu’ils pratiquent ce sport depuis de nombreuses années. Oui de vrais partenaires de vie !

Heu, excusez-moi de m’insinuer dans ce petit échange délicat et fructueux, mais la vie c’est ça ? C’est obligatoirement un combat et une lutte permanente avec l’être aimé, le collègue, l’ami ? Euh, rassurez-moi, on peut vivre sans entrer perpétuellement en concurrence avec ceux que l’on aime ou que l’on côtoie ? Hein, dites ? Non parce que franchement, c’est pas un peu épuisant tout ça ? Enfin moi, je sais pas, hein mais à chaque fois que je me mets en colère, je serre les dents, je contracte mes épaules, ma nuque devient un mur de béton. Je deviens Hulk en personne. Et on sait que quand même quand il se transforme en géant vert le Monsieur, ben il a un peu mal, quand même. Ca fait mal au corps et à l’âme tout ça, non ? On peut pas ajouter un peu de cordialité dans tout ce fatras ? Quitte à ce que ça devienne un peu artificiel au début mais bon, c’est peut-être un coup à prendre non ?

Alors on reprend :

Echange numéro un : S’il te plaît, est-ce que je peux finir ma phrase et après je t’écouterai plus attentivement si j’ai réussi à exposer mon argument ? Oui, bien-sûr, excuse-moi, mais j’avais peur que tu ne saisisses pas ce que je voulais dire, mais poursuis. Je ne suis pas d’accord avec ce que tu dis, mais je veux bien l’entendre. J’ai souvent l’impression d’avoir tort quand je te parle. Et bien si je te donne cette impression je m’en excuse, mais de mon côté je suis triste de voir que mon point de vue n’est pas souvent pris en compte. Et cetera, et cetera !

Echange numéro deux : Tu sais je souffre de ce dénigrement depuis longtemps déjà, et pourtant je pense que ce n’est pas ce que tu cherches. Oui mais de mon côté, je ne me sens pas écouté. J’ai la sensation de parler dans le vide alors que tu retiens certainement ce que je dis. Bon et puis, finalement, on a peut-être fortement besoin l’un de l’autre pour continuer à vivre. On pourrait essayer de trouver un terrain plus détendu à l’avenir, qu’en penses-tu ?

Certes c’est moins pêchu, mais on respire un peu. Non ? D’accord, il y a un petit côté bisounours qui se réveille en nous. On a l’impression d’assister à une séance collective de purge de violence. On se met des couronnes de fleurs sur la tête et on chante Imagine tous en cœur. Oui ben pourquoi pas après tout. Est-ce que ça nous ferait tant de mal que ça de mettre un peu moins de rancœur dans nos échanges ? Se mettre à l’écoute de l’autre, accepter les conseils de nos entourages, accepter de ne pas imposer les conseils mais de les transformer en suggestions. Apprendre à ne plus s’imposer. Se faire plus petit, plus humble. Crier des petits slogans du genre « Amour-propre au cachot, la violence c’est pas bô ! ».

Ouaip, peace and love mes frères. Nous le savons tous, c'est facile à dire, plein de bons sentiments. Mais après tout, c'est peut-être bien les bons sentiments non ? Alors même après 2 ans, 10 ans ou 40 ans de vie commune, laissons entrer la sérénité dans nos pénates. Les orteils en éventail, c’est plus sympa que serrés dans des escarpins étroits.

15/06/2012

Deux baffes et ça repart

Le sol est vaseux, vos pieds s’enfoncent dans une glaise épaisse et dense. L’obscurité glaciale règne autour de vous. Vous vous sentez écartelée dans tous les sens perdue au milieu d’une confusion perverse qui pollue votre esprit et vos sens. Une sensation d’étouffement envahit votre corps. Ce n’est pas un cauchemar, mais juste votre vie, le marasme dans lequel vous évoluez, sans pouvoir décoller les pieds de cette terre trop meuble et trop mouvante pour que vous vous stabilisiez.

    Bon, on ne va pas se voiler la face et se la raconter, genre je-suis-trop-fort-même-pas-ça-m’arrive-à-moi. Tout le monde a vécu un truc similaire au moins une fois dans sa vie. Tttttt, pas d’histoire, on connaît la chanson :
-    Les réveils vous rapprochent plus d’une victime de tsunami que d’un oisillon qui vient juste d’apprendre à voler.
-    Vos yeux en disent plus long sur la noirceur du monde qui se reflète dans vos orbites que sur la découverte improbable du vaccin contre le virus du SIDA.
-    Votre humeur vous fait passer de Mister Hide à Hulk quand il est hyper véner en moins de deux secondes, sans passer par la case Dr Jekyll ou Barbapapa. Et il vaut mieux éviter de vous demander comment ça va, le matin, à midi, à 13h30 ou à 17h ou à aucun moment de la journée finalement, voire de la semaine. C’est mieux.

-    Votre esprit combatif s’est depuis bien longtemps transformé en une sorte de tumeur aigrie et désagréable dont les seuls mots qui sortent sont emplis d’ironie lourde et de soupirs hystériques.

-    Dans ces moments-là, il vaut mieux déconseiller aux amis véritables de chercher à prévoir une sortie en votre compagnie. Ils finiraient les yeux injectés de sang, obligés qu’ils seront de se retenir de vous étriper en entendant vos jérémiades continuelles. Oui parce qu’évidemment, cette violence intérieure est communicative et vos ondes négatives ont largement irradié un vaste rayon de vos connaissances. Pensez à vérifier vos arrières au cas où certains auraient misé sur votre caboche auprès d’un tueur à gages.

-    Sans compter que de toutes façons, vous n’avez aucune envie de sortir, préférant une bonne soirée déprime à regarder 60 fois votre compte face de bouc en moins de quatre minutes pour voir s’il y a de nouvelles actualités. Et bien non. Sachez-le, vos amis ne sont pas scotchés au réseau. Ils sortent et ont une vie sociale parfois très épanouie. Si, si !

-    A cela s’ajoute inévitablement un rapport à la nourriture proche d’une livraison d’un sac de riz en Ethiopie : un carnage. Sauf que dans ce cas les denrées choisies par vos soins feraient pâlir un petit africain affamé. Les bonbons font exploser votre budget, ainsi que les boutons de votre pantalon et ceux de votre visage. Vous regardez parfois les chiottes en vous disant que vous vomiriez bien un coup, mais non, vous ne tomberez pas si bas, réflexion faite avec un sandwich saucisson-camembert dans la bouche. Pathétique.

Bref, vous déprimez. Mais vous en êtes consciente, début qui pourrait paraître prometteur si vous n’aviez pas pris la fâcheuse habitude de tout voir en noir profond.

Alors vous cherchez tout de même des solutions :
-    Le sport : votre volonté de fer n’y parviendra jamais, le fer est émoussé. Impossible de vous bouger plus d’une fois par mois. Cela vous fait du bien, mais l’effort à fournir pour bouger vos fesses jusqu’à la salle de sport ou la piscine représentent un obstacle que seul un super héros pourrait franchir.

-    Les livres qui font que tout-de-suite-là-maintenant tu te sens trop prête à affronter la vie et ses épreuves trop difficiles, tu vois : bon ça marche un temps, au moins pour voir les choses en gris. Vous avez fait toute la batterie de tests de la collection des ouvrages « Pour » : Pour gérer le stress, Pour penser positif, Pour faire du bien à votre corps, Pour mieux manger le soir, Pour réussir à poser le pied droit en premier le matin, Pour réussir à te dire que tu n’es pas complètement une merde parce que tu dois croire en toi et opter pour la positive attitude ! Ces livres vous permettent de conscientiser votre tristesse, vos faiblesses, mais au final, ça ne résout rien.

-      La psy : vous choisissez l’option psychologue plutôt que psychiatre afin d’éviter la médicamentation. En effet, à votre état larvaire pourrait s’ajouter une dangereuse dépendance, des accès de furie hystérique, des phases de sommeil profond, des plongées dans des univers parallèles qui donneront l’impression que vous avez fumé un champ entier de marijuana. Il vous faut tout de même faire montre d’une certaine contenance au boulot. L’option psy pourra vous permettre d’évoluer et surtout de parler à quelqu’un d’extérieur. Cela soulagera vos amis et votre famille. Lesquels enverront en douce des lettres de remerciement pour les avoir enfin libérés du joug de vos plaintes et sautes d’humeur. Mais cela ne suffira pas. Introspection et compagnie 0 – déprime 10.

Non, toutes ces techniques ne suffiront pas. Vous n’aurez pas le déclic. Et vous continuerez d’attendre de pouvoir donner une impulsion pour remonter à la surface.
Et un jour, au détour d’une de vos sempiternelles tergiversations, une ou deux amies agiront sans le savoir comme un coup de fouet stimulant. L’effet « deux baffes et ça repart ».  Elles vous assènent un uppercut qui devrait, de l’avis de tous, vous laisser sur le carreau. Une remarque sur votre comportement, une pique à l’encontre de votre égoïsme ou de votre mécontentement permanent et le ciel soudain s’ouvre sous vos yeux. Vous vous retrouvez face à votre propre portrait, tel un miroir reflétant votre être profond, face à vous-même.
Vous avez alors deux solutions :
-    Soit vous ne parlez plus jamais à vos copines parce que là franchement elles ont trop exagéré, tu vois, j’aurais jamais cru ça d’elles ! Oui non mais trop pas ! Vous continuez gentiment à vous voiler la face et à vivre dans votre petit monde glauquissime.
-    Soit vous acceptez de voir la vérité en face, vérité que vous connaissiez parfaitement, mais qu’il était plus facile d’enfouir bien profond. C’est alors que vous réagissez. L’envie, enfin, de taper de nouveau du pied, de quitter la vase, de respirer un grand bol d’optimisme et de sérénité vous submerge.

Comme un puzzle inachevé, les pièces se remettent une à une dans leur disposition finale pour créer un tableau que vous discernez enfin : votre instant présent et votre capacité à avancer par petits pas ou grands sauts, vers un horizon plus favorable. Une étrange sérénité voit le jour et envahit votre esprit. Vous savez que le combat contre vous-même ne touche pas encore à sa fin (le fera-t-il d’ailleurs un jour ?) mais vous avez envie de vous battre à nouveau, avec le sourire. C’est un combat serein, une construction plus qu’une destruction.

Alors d’un simple mouvement, un baiser sur une joue, vous remerciez vos amies d’avoir été ce qu’elles devaient être : des amies.

10/05/2012

Dis Maman, le bordel c’est quoi ?

Et bien ma chérie, le bordel c’est avant tout l’état dans lequel tu finiras bien un jour par mettre ta chambre. Des fringues portées une seule fois remisées en boule sur le sol, avec un soigneux mélange de culottes sales, de chaussettes très moyennes et de vieilles affaires de danse que tu finiras de faire sécher au sèche-cheveux juste avant ton cours. Le bordel c’est aussi tes cours sauvagement abandonnés sur ce qui te sert de bureau, c’est-à-dire ta chaise, le sol encore, une partie de ton lit une place et parfois une autre pièce de la maison. Oui car tu ne te contenteras pas d’envahir uniquement ton espace personnel. NON ! Tu prendras soin, consciencieusement, d’aller emmerder tes parents avec tes disques, tes bouquins, tes épingles à cheveux. Sans compter que tu ne pourras plus compter sur ta mère, qui aura largement baissé les bras et installé un tabouret devant ta porte afin de déposer ton linge doux, léger, propre et parfumé, étant elle-même dans l’incapacité de pénétrer dans ton antre.

Le bordel c’est aussi le jour où tu vas commencer à étudier et te faire à manger seule. Là, la vaisselle aura la fâcheuse manie de ne plus se laver de manière autonome. Le linge s’entassera encore, mais là, personne pour le sauver de la moisissure. Le bordel, c’est quand tu seras à la veille de tes exams de deuxième semestre et que tu n’auras pas mis d’ordre dans tes cours. Tu pleureras les larmes de ton corps parce que tu sauras, oui tu sauras, qu’entre la page 8 et la page 12 de ton cours de sociologie politique, il y a les autres pages, celles pour lesquelles le prof avait bien déclamé, d’une voix intelligible et claire : « Voici la partie la plus importante ! ».

Le bordel ce sera aussi quand tu commenceras à vivre avec ton amoureux. Tu auras déjà commencé à corriger certains travers. Tes cours seront d’une rigueur effroyable, fichés, résumés, classés, presque travaillés avant même d’avoir été pris en note. Mais ton amoureux n’aura pas toujours la même façon de vivre, alors tu te laisseras débordée. Tu voudras profiter de chaque instant avec lui. Jusqu’à en craquer et faire un ménage de printemps tous les dimanches, voire les soirs où il ne sera pas là. Ça sera le bordel des premières concessions.

Puis le bordel poursuivra sa route, inlassable, jusqu’à ton mariage qui marquera le début d’un bordel encore plus insidieux et pervers. Une impression de vie carrée, rangée, ordonnée enfin, mais vide de créativité, vide de bordel fructueux. Le bordel s’insinuera insidieusement dans tes pensées, ramollissant tes facultés, faisant de toi une vitrine de faux-semblant. Rien ne transparaîtra dans ton organisation quotidienne et pourtant tu t’infuseras jusqu’à perdre tes principes actifs. Et puis ce bordel explosera. Brève et rapide explosion. Libératrice explosion.

Le chaos prendra place un moment, histoire de laisser ressurgir ton petit bordel à toi. Il reviendra d’abord par la porte de derrière et toquera finalement d’un coup sec et franc à ta porte d’entrée. Rassurant ce petit bordel, bien à toi, oui, à protéger. Finalement, il est un peu ta force vitale.

Et puis un jour, reviendra un autre amoureux. Tu recommenceras un peu à oublier cette petite partie de toi, mais l’alarme aura été tirée une fois. Elle te parlera, elle titillera tes oreilles, elle te susurrera de subtils avertissements : « Méfie-toi du chaos, pense à moi, ton doux et rassurant petit bordel ! ». Alors tu agiras dans le bon sens, sans te perdre comme autrefois.

Là, tu réaliseras à quel point ce petit bordel, c’est ton bien le plus précieux. A présent tu devras le chérir et le conserver comme un trésor à ressortir dans tous les moments troubles, les moments de doute. Un allié précieux quand tu voudras changer de vie, de job, déménager encore et encore.

Ta force, celle qui fait, ma fifille, que je t’aime énormément. Mais en attendant, va ranger tes jouets. Et plus vite que ça.  

30/04/2012

Page Blanche

La page blanche envahit votre vision. Elle ne décolore à aucun instant. C’est comme une eau de javel trop efficace qui lamine l’email de votre inspiration. Lorsque ce vide apparaît, il devient un brouillard qui pollue l’équilibre de vos pensées. Il aveugle de sa sombre lumière, néfaste et nauséabonde. Il entraîne dans son sillage ses copains cavaliers : la faucheuse tristesse, la tendre mélancolie, le lugubre dégoût et la puissante léthargie.
Pourtant, vous luttez contre cette tentation de sombrer dans ce dilemme scriptural : écrira/écrira pas. Les idées effleurent par à coup le bout de vos doigts. Ils saisissent parfois une plume, une feuille blanche qu’ils s’empressent de griffonner, lançant des bouteilles à la mer remplies de mots dispersés. Un fouillis encore informe qui n’attend que son heure pour se développer en un récit empreint de rebondissements, d’ironie grinçante et de poésie discordante.
Mais comment poursuivre la tâche incongrue de vouloir noircir des pages alors même que rien ne sort du cerveau, rien de concret. Faut-il enfanter dans la douleur ? Poursuivre le travail sans cesse et tordre et distordre le texte afin de trouver le bon mot ? L’entreprise est fastidieuse. Elle exige une disponibilité dont vous ne disposez pas. Et pourtant.
Votre bien-être tient à ça. Au pouvoir de transformer le blanc en une horde de mots virevoltants et multicolores. Si seulement vous aviez le temps, si seulement le vocabulaire perfide ne s’enfuyait pas à chaque seconde qu’il passe à travers les lèvres de votre cerveau. Mais c’est quand vous croyez la tentative avortée que le flot commence à affluer. Il devient alors difficile de s’arrêter.
Les mots se déversent et veulent partir en tous sens. Il faut pourtant les contenir car les doigts ne tapent pas aussi rapidement que le langage qui se crée à l’intérieur de votre crâne. Le tourbillon devient impétueux. Il brouille la donne, provoque une euphorie impossible à maîtriser. Ca pousse dans toutes les directions. Il vous faudrait devenir pieuvre pour pouvoir rédiger aussi vite que votre pensée. Verbe, adjectif, adverbe, petits mots qui dansent autour de vous, à la fois précis et manquant cruellement de justesse. Ca s’entrechoque, parlemente en version mach 7 ; une mitraillette de sons, de signes qui se percutent pour tenter de concrétiser l’idée qui vient de poindre. C’est grisant et revigorant.
Et quand les doigts fatiguent, quand le cerveau ralentit, vous savez que vous avez réussi à sortir de la torpeur. Qu’enfin l’inspiration est réapparue. Vous pouvez souffler. Il vous faudra juste ne jamais perdre de vue que la page blanche menace, tapie dans l’ombre. Elle peut toujours réapparaître et vous frapper de plein fouet. Il vous faudra alors prévenir l’attaque. Arroser quotidiennement le champ de vos observations, vous imprégner de sensations, d’émotions qui permettront de soutenir votre inspiration et de la cultiver sereinement.
On n’est pas toujours obligé d’enfanter dans la douleur.

29/04/2012

"Chéri, tu viens chez moi ...?"


Cela fait une paire d’années que votre moitié partage votre vie. Enfin cela signifie en gros que ses chaussettes et ses caleçons poussent régulièrement au pied de votre lit (oui c’est de la mauvaise herbe, mais finalement elle vous rassure cette mauvaise herbe, pas vrai ?). Petit à petit sa pile de vêtements augmente dans une partie de VOTRE armoire. Vous ne comptez plus le nombre de bouquins qu’il a laissés sur vos étagères et le frigo s’est rempli de bières, de sauces piquantes en tous genres, de charcuterie et de fromages qui puent. Sa brosse à dent mêle ses poils à la vôtre (oui c’est un peu dégueu mais très commun finalement) et la lunette des toilettes adopte plus souvent une position inadéquate pour une femme. En gros, l’homme s’est installé à 95% chez vous. Et pourtant, vous ressentez comme un léger malaise… Ha ben oui, ce sont ces fameux 5% qui restent incrustés chez lui. Pas moyen de les faire bouger.

Comment se fait-il qu’après autant de temps passé en votre compagnie, le mâle n’ait pas définitivement marqué son territoire chez vous ? Non, il continue inlassablement de garder sa propre tanière et de jouer au chasseur-cueilleur, se réfugiant encore dans son antre, avec son gros sac de voyage, après une presque semaine passée en votre compagnie.

Les raisons de ce blocage seront peut-être recherchées plus tard. Intéressons-nous plutôt aux différentes stratégies qui pourraient faire passer le sexe opposé du côté obscur de la vie sédentaire à deux.

Stratégie n°1 : Very irresistible… Il s’agit ici de vous transformer en un objet de désir permanent. Attention cette stratégie demande un certain investissement pécuniaire non négligeable et une force mentale digne d’un moine shaolin. Oui parce que cela implique le port des talons (n’en déplaise à votre voisine du dessous), de la jupe fendue, des bas ultra sexy. Votre forfait épilation explose votre budget, explosion soutenue par le prix exorbitant des crèmes sublimant votre corps grâce à leurs phtalates et autres produits tout à fait innocents pour l’environnement. Vous vous mettez en devoir d’être toujours impeccable, incarnation permanente du fantasme de votre homme. Votre seul déhanchement doit le rendre fou. Jouez la distance sauvage de la femelle, sûre de la puissance de ses attraits. Alors oui, vous le savez parfaitement, cette stratégie est épuisante, physiquement et mentalement. Au bout de quelques jours, vous rêvez de troquer les talons contre vos charentaises fétiches et votre nuisette ficelée contre votre pyjama en pilou. Et surtout, vous vous apercevez que l’homme ne remarque pas toujours la tenue affriolante que vous portez. Non, lui, comme vous, ne voit parfois plus que votre beauté intérieure…

Stratégie n°2 : « I need you ». Ou comment se rendre indispensable. Attention ! Cette stratégie implique une capacité à se transformer en Cendrillon version je bosse pour toi mon amour. Là, vous êtes aux petits soins. As-tu envie d’une bière mon chéri ? Je te l’apporte tout de suite. Non, laisse, je vais faire la vaisselle après avoir repassé ta chemise. Continue à jouer à ton jeu. Non, non, pas la peine d’utiliser le balai à chiottes, tu sais bien que j’adore faire le ménage après toi… Oui bon, cette version soumise est insupportable à lire (et à écrire). Et pourtant, pensez au nombre de femmes qui ont vécu ou vivent encore ce traumatisme aujourd’hui. Mais sachez que parfois, après avoir attiré le mâle par ce stratagème, la femme-Cendrillon se transforme en harpie, maniant le rouleau à pâtisserie avec une aisance déconcertante. Hommes, méfiez-vous des femmes-Cendrillon.

Stratégie n°3 : « Bien-sûr, Lumière de ma vie, tes amis peuvent venir ce soir ». Ou comment faire de votre appart le lieu de beuverie de votre Jules et de ses potes. Alors-là, attendez-vous à terminer la plupart de vos soirées dans votre chambre, si vous n’habitez pas dans un studio, évidemment. Dans le cas contraire, il vous reste le gaz. Soit vous avez la force mentale d’un jedi prêt à supporter les plus grandes épreuves, soit vous finirez par adopter les modes de consommations les plus polluants qui existent. Après avoir fait votre deuil des quatre dernières assiettes en porcelaine de Mamie, vous optez pour le plastique jetable, la bouffe, jetable aussi, le caddy pour apporter le verre dans les conteneurs. Faites attention cependant à ne pas cumuler avec la stratégie n°2. Parce que le chasseur-cueilleur pourrait avoir l’outrecuidance d’estimer que le nettoyage post-fiesta n’est pas de son ressort ! Résistez sur ce point et adoptez les boules Quies©.

Stratégie n° 4 : Piéger ses papilles… Devenez une véritable sorcière du goût. Oui parce que le chasseur-cueilleur en a eu marre au bout d’un moment de rechercher sans cesse sa nourriture et de mâchonner de la viande pas cuite. Votre appart s’enrobe de fumets délicats. Vous téléchargez toutes les appli cuisine de Grands-Chefs vaudous sur votre Smartphone. La recherche du filtre le plus puissant deviendra votre seule et unique priorité. Les ingrédients n’auront plus aucun secret pour vous. Vous le tenez par le palais. Il oubliera définitivement les saveurs des kebabs-frites-sauce-ninja. Attention cependant. Votre budget, en ces temps de crise, se verra fondre comme neige au soleil. Sans compter que la cuisine de haute voltige demande un temps indéniable et que parfois, on a bien envie de se faire livrer et de ne se poser aucune question.

Stratégie n° 5 : Je suis lui… il est lui ! Ici, il s’agira d’un des plus grands sacrifices à accorder à votre moitié : devenir lui. Vous adorez soudainement jouer aux jeux vidéo de voitures. Vous adoptez le mode bière-foot. Vous ne lisez que ce qu’il aime ; vous ne mangez que ce qu’il aime (aïe l’estomac) ; vous n’allez voir que les films qu’il aime. Vous utilisez ses expressions. Vous oubliez de rabattre la lunette des chiottes. Halte-là ! Votre sur-moi finira par hurler de douleur et votre personnalité ressurgira en provoquant des dégâts incommensurables. Et de toute façon est-ce pour ça qu’il est dingue de vous ? Non.

Alors face à ces différentes stratégies, il n’en existe qu’une seule qui soit la véritable et la plus efficace. Restez vous-même. Pleurez, criez, souriez, vivez votre vie, suivez vos envies, restez indépendante et un brin sauvage. Ce n’est pas de l’égoïsme, mais votre vie en sera plus belle avec lui. Le Jules aura besoin de vous savoir la plus équilibrée et heureuse possible pour se sentir en sécurité. Alors le chasseur-cueilleur aura peut-être enfin envie de faire de votre grotte son propre home-sweet-home. 

11/04/2012

Léthargie douce amère

Salut à tous,
Quelle longue pause dans l'écriture !
Je n'ai jamais voulu faire de ce blog un journal intime. Et je ne m'accorderai aujourd'hui qu'une légère incartade. L'envie d'écrire est présente, mais l'énergie, la colère, le moteur de mon souffle se sont un peu épuisés. Des perturbations physiques m'empêchent de retrouver ma dévastatrice énergie. Un questionnement professionnel profond envahit la petite place accordée à ma créativité dans mon cerveau. Ma vie personnelle frôle l'équilibre, enfin, mais ne se résout pas encore à une complète stabilité. Mon habitat ne répond pas à mes attentes. Une légère frustration globale court-circuite ma motivation.
C'est l'heure des pourquoi, des comment, des remue-toi le derrière ma petite, mais avec une sorte de léthargie douce-amère qui me suit comme une ombre. L'envie d'agir est présente ; or, l'immobilisme continue de me poursuivre de ses assiduités.
C'est la grande heure des décisions, des changements. Encore.
Alors prenez patience si vous êtes accro au blog. Je vous promets de revenir vite avec de nouvelles chroniques. Et de nouvelles aventures rendues ubuesques par la seule force de la réalité du monde !
Bien à vous.
Titane

06/02/2012

Deux baffes et ça repart

Le sol est vaseux, vos pieds s’enfoncent dans une glaise épaisse et dense. L’obscurité glaciale règne autour de vous. Vous vous sentez écartelée dans tous les sens perdue au milieu d’une confusion perverse qui pollue votre esprit et vos sens. Une sensation d’étouffement envahit votre corps. Ce n’est pas un cauchemar, mais juste votre vie, le marasme dans lequel vous évoluez, sans pouvoir décoller les pieds de cette terre trop meuble et trop mouvante pour que vous vous stabilisiez.

    Bon, on ne va pas se voiler la face et se la raconter, genre je-suis-trop-fort-même-pas-ça-m’arrive-à-moi. Tout le monde a vécu un truc similaire au moins une fois dans sa vie. Tttttt, pas d’histoire, on connaît la chanson :
-    Les réveils vous rapprochent plus d’une victime de tsunami que d’un oisillon qui vient juste d’apprendre à voler.
-    Vos yeux en disent plus long sur la noirceur du monde qui se reflète dans vos orbites que sur la découverte improbable du vaccin contre le virus du SIDA.
-    Votre humeur vous fait passer de Mister Hide à Hulk quand il est hyper véner en moins de deux secondes, sans passer par la case Dr Jekyll ou Barbapapa. Et il vaut mieux éviter de vous demander comment ça va, le matin, à midi, à 13h30 ou à 17h ou à aucun moment de la journée finalement, voire de la semaine. C’est mieux.

-    Votre esprit combatif s’est depuis bien longtemps transformé en une sorte de tumeur aigrie et désagréable dont les seuls mots qui sortent sont emplis d’ironie lourde et de soupirs hystériques.

-    Dans ces moments-là, il vaut mieux déconseiller aux amis véritables de chercher à prévoir une sortie en votre compagnie. Ils finiraient les yeux injectés de sang, obligés qu’ils seront de se retenir de vous étriper en entendant vos jérémiades continuelles. Oui parce qu’évidemment, cette violence intérieure est communicative et vos ondes négatives ont largement irradié un vaste rayon de vos connaissances. Pensez à vérifier vos arrières au cas où certains auraient misé sur votre caboche auprès d’un tueur à gages.

-    Sans compter que de toutes façons, vous n’avez aucune envie de sortir, préférant une bonne soirée déprime à regarder 60 fois votre compte face de bouc en moins de quatre minutes pour voir s’il y a de nouvelles actualités. Et bien non. Sachez-le, vos amis ne sont pas scotchés au réseau. Ils sortent et ont une vie sociale parfois très épanouie. Si, si !

-    A cela s’ajoute inévitablement un rapport à la nourriture proche d’une livraison d’un sac de riz en Ethiopie : un carnage. Sauf que dans ce cas les denrées choisies par vos soins feraient pâlir un petit africain affamé. Les bonbons font exploser votre budget, ainsi que les boutons de votre pantalon et ceux de votre visage. Vous regardez parfois les chiottes en vous disant que vous vomiriez bien un coup, mais non, vous ne tomberez pas si bas, réflexion faite avec un sandwich saucisson-camembert dans la bouche. Pathétique.

Bref, vous déprimez. Mais vous en êtes consciente, début qui pourrait paraître prometteur si vous n’aviez pas pris la fâcheuse habitude de tout voir en noir profond.

Alors vous cherchez tout de même des solutions :
-    Le sport : votre volonté de fer n’y parviendra jamais, le fer est émoussé. Impossible de vous bouger plus d’une fois par mois. Cela vous fait du bien, mais l’effort à fournir pour bouger vos fesses jusqu’à la salle de sport ou la piscine représentent un obstacle que seul un super héros pourrait franchir.

-    Les livres qui font que tout-de-suite-là-maintenant tu te sens trop prête à affronter la vie et ses épreuves trop difficiles, tu vois : bon ça marche un temps, au moins pour voir les choses en gris. Vous avez fait toute la batterie de tests de la collection des ouvrages « Pour » : Pour gérer le stress, Pour penser positif, Pour faire du bien à votre corps, Pour mieux manger le soir, Pour réussir à poser le pied droit en premier le matin, Pour réussir à te dire que tu n’es pas complètement une merde parce que tu dois croire en toi et opter pour la positive attitude ! Ces livres vous permettent de conscientiser votre tristesse, vos faiblesses, mais au final, ça ne résout rien.

-      La psy : vous choisissez l’option psychologue plutôt que psychiatre afin d’éviter la médicamentation. En effet, à votre état larvaire pourrait s’ajouter une dangereuse dépendance, des accès de furie hystérique, des phases de sommeil profond, des plongées dans des univers parallèles qui donneront l’impression que vous avez fumé un champ entier de marijuana. Il vous faut tout de même faire montre d’une certaine contenance au boulot. L’option psy pourra vous permettre d’évoluer et surtout de parler à quelqu’un d’extérieur. Cela soulagera vos amis et votre famille. Lesquels enverront en douce des lettres de remerciement pour les avoir enfin libérés du joug de vos plaintes et sautes d’humeur. Mais cela ne suffira pas. Introspection et compagnie 0 – déprime 10.

Non, toutes ces techniques ne suffiront pas. Vous n’aurez pas le déclic. Et vous continuerez d’attendre de pouvoir donner une impulsion pour remonter à la surface.
Et un jour, au détour d’une de vos sempiternelles tergiversations, une ou deux amies agiront sans le savoir comme un coup de fouet stimulant. L’effet « deux baffes et ça repart ».  Elles vous assènent un uppercut qui devrait, de l’avis de tous, vous laisser sur le carreau. Une remarque sur votre comportement, une pique à l’encontre de votre égoïsme ou de votre mécontentement permanent et le ciel soudain s’ouvre sous vos yeux. Vous vous retrouvez face à votre propre portrait, tel un miroir reflétant votre être profond, face à vous-même.
Vous avez alors deux solutions :
-    Soit vous ne parlez plus jamais à vos copines parce que là franchement elles ont trop exagéré, tu vois, j’aurais jamais cru ça d’elles ! Oui non mais trop pas ! Vous continuez gentiment à vous voiler la face et à vivre dans votre petit monde glauquissime.
-    Soit vous acceptez de voir la vérité en face, vérité que vous connaissiez parfaitement, mais qu’il était plus facile d’enfouir bien profond. C’est alors que vous réagissez. L’envie, enfin, de taper de nouveau du pied, de quitter la vase, de respirer un grand bol d’optimisme et de sérénité vous submerge.

Comme un puzzle inachevé, les pièces se remettent une à une dans leur disposition finale pour créer un tableau que vous discernez enfin : votre instant présent et votre capacité à avancer par petits pas ou grands sauts, vers un horizon plus favorable. Une étrange sérénité voit le jour et envahit votre esprit. Vous savez que le combat contre vous-même ne touche pas encore à sa fin (le fera-t-il d’ailleurs un jour ?) mais vous avez envie de vous battre à nouveau, avec le sourire. C’est un combat serein, une construction plus qu’une destruction.

Alors d’un simple mouvement, un baiser sur une joue, vous remerciez vos amies d’avoir été ce qu’elles devaient être : des amies.

11/01/2012

Page blanche...

Page blanche et désolée pour ce silence.

Je vous souhaite à tous une très belle année 2012. Que le bonheur vienne régulièrement picoter vos synapses, que la joie étincelle dans vos yeux devant des choses simples, que la santé devienne votre principale alliée, et que vos rêves les plus doux se réalisent par l'action de votre belle et courageuse volonté.
Une bise à tous et des chroniques dès que possible.